2020, l’Odyssée de la télémédecine

La grande gagnante de la crise sanitaire de 2020 est sans doute la télémédecine. Il faut dire que la pandémie de coronavirus a bouleversé les systèmes de santé du monde entier, y compris les pays développés. En France, les téléconsultations ont permis de consulter un médecin à distance tout au long du confinement, soulageant par la même occasion des hôpitaux et cabinets surchargés.

Les téléconsultations sont remboursées par l’Assurance Maladie depuis septembre 2018. Malgré cela, elles ne représentaient depuis qu’une part extrêmement marginale des consultations. Le Covid-19 a changé la donne : l’Assurance Maladie a ainsi déclaré que 5,5 millions de téléconsultations ont été remboursées entre mars et avril 2020, contre 138 000 entre septembre 2018 et décembre 2019.

La télémédecine pourrait aussi apporter une solution aux déserts médicaux. La France compte 3,1 médecins pour 1000 habitants, un nombre resté stable depuis 2000 alors qu’il a augmenté dans le reste de l’Europe. En Europe, le nombre moyen de médecins pour 1000 habitants est de 3,6.

Un boom soutenu par les circonstances mais aussi par un nouveau remboursement : à partir du 18 mars 2020, lendemain du début du premier  confinement, les téléconsultations ont basculé sur un remboursement à 100%. Tout assuré pouvait donc bénéficier d’une consultation depuis le canapé de son salon avec la certitude de ne rien débourser.

La télémédecine n’est qu’une infime partie de l’immense iceberg que représente l’e-santé, et des possibilités que crée la technologie appliquée à la santé et à la médecine. Peu à peu, ce sont tous les possibles du futur de la médecine qui se dessinent ainsi sous nos yeux.

Des comportements de santé en pleine mutation

Ce que montre bien l’explosion de la télémédecine, c’est un changement progressif des comportements. Jusqu’au coronavirus, l’adoption de l’e-consultation souffrait entre autres :

  1. D’un problème de regard, tant du côté des médecins que de celui des patients
  2. D’obstacles financiers (investissement)
  3. D’une crainte de la nouveauté

C’est tout simple : le changement, cela prend du temps ! Pourtant les comportements et les usages se modifient peu à peu et l’e-santé est déjà entrée dans nos foyers avant la pandémie. Les applis de fitness qui se sont généralisées dans votre montre ou votre téléphone portable ? Les trackers de santé qui se sont installés sur votre mobile ? C’est déjà de l’e-santé !

On définit l’e-santé comme “l’ensemble des moyens et services liés à la santé qui utilisent les nouvelles technologies de l’information et de la communication” (Futura Sciences).

Et ce pan de l’e-santé se porte bien, merci pour lui. Ainsi, au 1er trimestre 2020, plus de 14 millions de Smartwatches ont été livrées à travers le monde, soit un bond de 12% par rapport à 2019. Selon GlobalData, les objets connectés du marché médical valaient près de 27 milliards de dollars en 2019, et le marché devrait atteindre les 64 milliards de dollars en 2024. Une croissance aidée par :

  • Les coûts des soins 📈
  • Le vieillissement de la population 👵

Même le personnel médical s’y est mis et les objets connectés de la santé représentent désormais un tiers du secteur de l’IoT (Internet of Things) !

Du côté des applications mobile de la santé, elles sont plus de 160 000 en France et plus de 325 000 dans le monde – un nombre qui a doublé rien qu’entre 2015 et 2017. Un marché juteux dont on estimait pré-Covid qu’il s’élèverait à 236 milliards de dollars en 2026.

graphique comportements santé

Favorisés par l’essor de l’Internet et des forfaits pour smartphone, portés par l’habitude d’avoir de la technologie dans nos quotidiens, ces changements de comportements tant du corps médical que des patients et fitness addicts divers ont permis à la santé connectée de devenir un marché florissant.

Dans la santé connectée, tout est possible : suivi des patients, prévention (crise cardiaque, etc.), accompagnement de maladies chroniques… Quelques exemples :

  • Stars des objets connectés, les bracelets permettent de tracker votre activité physique, suivre votre rythme de sommeil ou encore veiller sur votre exposition au soleil (oui, oui !)
  • Les balances connectées s’installent dans les foyers pour aider à la perte de poids
  • Des capteurs permettent de surveiller la glycémie des diabétiques, un patch de géolocaliser les patients atteints d’Alzheimer, des implants de prévenir les infarctus

Dans le futur, les objets connectés joueront peut-être un rôle dans la lutte contre les maladies cardiovasculaires et le cancer. Aujourd’hui déjà, des soutiens-gorge connectés sont en développement pour détecter le cancer du sein à un stade précoce.

Quand la législation se mêle de l’innovation

Mais du côté de la loi, alors ? Car il a bien fallu que la législation suive. Collecte des données personnelles, remboursement par l’Assurance Maladie ou encore, aux États-Unis, approbation de la Food and Drug Administration (FDA), auprès de qui n’a notamment pas été validé l’HealthKit de l’Apple Watch : autant d’étapes indispensables pour le développement et la généralisation de l’e-santé.

Une directive européenne sur les dispositifs médicaux encadre la conformité de ces appareils… et surtout définit la notion même de dispositif médical ! C’est la directive 93/42/CEE. Lui a succédé le règlement UE 2017/745.

Toute cette réglementation vise à garantir aux utilisateurs :

  • La fiabilité des équipements médicaux
  • Leur sécurité
  • L’efficacité médicale de ces équipements
  • Le respect de leur vie privée

Son apparition même, son évolution plus encore, témoignent toutes deux du développement de l’e-santé. Face à l’essor des nouvelles technologies liées à la santé, il a bien fallu les encadrer pour protéger les usagers et garantir les droits et libertés de chacun, corps médical comme patients.

Malgré l’essor de l’e-santé et la place grandissante de la technologie dans le médical, les Français restent méfiants. En 2018, un sondage IPSOS a montré que seuls 29% des Français accepteraient un diagnostic posé par une Intelligence Artificielle (IA).

Par essence, la médecine est le terrain de jeu du progrès. En un siècle, elle a contribué à permettre l’allongement de notre espérance de vie de plus de 30 ans. Elle a créé le vaccin, le pacemaker, l’IRM, la greffe, la thérapie génique.

Nos champs de bataille ont accéléré ses avancées ; ils ont vu naître ou évoluer la radiologie, la chirurgie esthétique, la transfusion sanguine, la médecine d’urgence. Aujourd’hui, le futur de la médecine réside-t-il dans la machine et l’Intelligence Artificielle ?

Alors, à quoi ressemblera la médecine de demain ?

Les innovations technologies rendent les possibilités de la médecine presque infinies. Pour les pathologies chroniques, responsables de 70% des coûts médicaux, l’e-santé promet un futur moins cher et un quotidien plus simple.

L’aspect économique est un enjeu considérable pour l’e-santé. Elle pourrait par exemple aider à diminuer les factures d’hôpital considérables des Américains. Mais, au contraire, on s’inquiète aussi au sujet du potentiel coûteux de la technologie médicale.

Un exemple : en France, les diabétiques sont près de 650 000 à devoir surveiller quotidiennement leur glycémie. Des systèmes comme Freestyle Libre leur permettent de mesurer leur glycémie sans piqûre ; une application comme Diabéo d’avoir un suivi et un accompagnement à distance.

Pour la santé mentale également, la technologie peut soulager des souffrances :

  • La réalité virtuelle de Centre Axel peut aider à soulager les hallucinations des schizophrènes
  • Les applications mobiles aident à la gestion du stress, de l’insomnie, des troubles de l’humeur
  • Les objets connectés et l’IA offrent aussi de solides perspectives dans la gestion des troubles de l’humeur ou anxieux ainsi que des addictions

En Angleterre, la start-up Immersive Rehab propose de la rééducation associée à la réalité virtuelle. Réinventer la kinésithérapie, c’est maintenant !

On l’a dit, la technologie est aussi une solution aux déserts médicaux. En France, on comptait plus de 226 000 médecins en janvier 2019, dont 45% de généralistes. Mais tout le territoire n’a pas les mêmes accès aux soins. La téléconsultation permet de faciliter l’accès à un médecin, mais les perspectives sont aussi autres.

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Imaginez : malade et incapable de vous déplacer, vous vous faites livrer vos médicaments par… un drone. Eh bien c’est déjà un peu réalité ! Au Ghana et au Rwanda, les drones de la start-up Zipline permettent d’acheminer des médicaments aux populations rurales.

À vrai dire, les possibilités d’innovation sont sans limite. Elles demanderont parfois une certaine prudence, en tout cas une évolution certaine des législations et une vigilance extrême quant à la protection des données personnelles, mais nous pouvons rêver à un monde où la technologie accélérera la recherche et la lutte contre le cancer ; à un monde peuplé de cœurs digitaux en 3D et de casques de réalité virtuelle ; à un monde où IA rimera avec médecine.

Le cancer est l’un des grands épouvantails de la médecine. Dans le monde, il est responsable d’1 décès sur 6. Au programme des années à venir : un stylo sonde pour analyser les cellules cancéreuses, des nanoparticules ou encore des nano-drones biologiques.

Une chose est sûre : la Health Tech décolle. Les investissements dans la médecine digitale sont au plus haut, l’e-santé encore accélérée par la pandémie de coronavirus. En 2018, plus de 13 000 nouveaux brevets ont été déposés. En 2023, le marché de l’e-santé devrait prendre 160% depuis 2019 et atteindre plus de 230 milliards de dollars.

Que les médecins généralistes (ou spécialistes !) ne s’inquiètent pas : leur temps est loin d’être terminé. Le futur ne sera pas uniquement fait de robots et d’applications mobile. Mais les perspectives de l’e-santé redéfiniront probablement la profession.

Pour leur quotidien, la technologie pourrait signifier un suivi plus facile et plus rapide, une planification plus aisée, une anticipation de l’évolution médicale de leur patient. Avec peut-être, au bout de la route, la satisfaction d’avoir sauvé une vie qui n’aurait pas pu l’être aujourd’hui.

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